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Le SEXE ou la MORT

 

 

 

    <<  Le non-dit transgénérationnel, que l’on peut appeler fantôme et qui cause des dégâts si considérables à mesure qu’il traverse les générations, cache essentiellement des questions de sexe et de mort. Il est donc capital de comprendre que nous venons d’une société qui, grosso modo à partir de la Révolution Française, est devenue sexuellement malade. Rappelez-vous que, sous Louis XIV, les Français faisaient encore l’amour en public, ou en famille, et que le roi lui-même s’accouplait avec ses maîtresses au vu et au su de tous ! La vague puritaine commence à tout geler à partir du siècle des Lumières, en se fondant sur des thèses largement autant scientifiques et médicales que religieuses. Peu à peu, on s’est mis à confondre la science et Dieu - on s’est pris pour les maîtres, pensant tout résoudre. Arrivé au 19ème siècle, cet obscurantisme moderniste devient franchement terrorisant. Le corps humain et le sexe sont littéralement torturés, à une échelle inouïe, sous l’empire d’une sorte d’alliance perverse entre les prêtres, les médecins et les mères castratrices (les médecins s’avèreront pire que les curés !). Ce qui provoque, on ne le dit jamais assez, une véritable hystérie de masse - avec d’un côté la Vierge Marie et de l’autre les maisons closes pour bourgeois fétichiste ! C’est dans ce contexte qu’est née la psychanalyse de Sigmund Freud, dont on ne peut que se réjouir de l’avènement, mais dont il faut bien comprendre qu’elle avait pour seule référence anthropologique « normale », une gigantesque maladie humaine. Une humanité coupée en deux. La maman et la putain ! Dans ce chaos absolument spécifique à l’Occident , la façon dont se transmet la « malédiction des ancêtres » est totalement passée à la trappe.

     Ainsi, axer toute la psychanalyse sur la théorie de la castration, puis appliquer celle-ci à l’enfant, est ridicule. Pour l’enfant, elle n’a aucun sens. Cela a empêché plusieurs générations de thérapeutes de comprendre qu’un enfant ne peut pas se construire harmonieusement s’il ne sait pas qu’il sort aussi des testicules de son père ! Si cet enfant a des problèmes, mettons à l’école, le psy consulté a toutes les chances de conclure : « Ah, pas de souci, votre enfant fait juste son Œdipe. » Mais il ne demandera jamais aux parents : « Votre enfant sait-il bien qu’il est sorti des testicules de son père ? » Vous savez, dans bien des cas, je me suis aperçu que des enfants avaient été sauvés par un père ou un grand-père grivois qui, en racontant des tas de cochonneries à la cantonade, les avait indirectement informés de la place exacte du sexe du père dans leur arrivée au monde ! Mais Freud ignorait que la psyché familiale est une entité propre, agissant au même titre que la psyché individuelle...

    Si je me suis intéressé à l’acupuncture, au taoïsme et au chamanisme, c’est en grande partie parce qu’on s’y préoccupe des fantômes, c’est-à-dire de tous nos proches, parents, amis, aïeux qui sont « mal morts » et qui, d’une manière ou d’une autre, continuent à nous hanter.

    Se préoccuper de ceux de nos morts qui ne peuvent pas tranquillement "continuer leur route" est un travail d’hygiène mentale, qui a été, de tout temps, considéré comme aussi essentiel qu’indispensable. Cela, dans l’intérêt de tous : du défunt comme de ceux qui lui survivent.

    Et dans toutes les cultures, sauf la nôtre, où le matérialisme tend à limiter le rapport au défunt à la qualité du "sac poubelle" dans lequel on l’emballe. Les conséquences pathogènes que cela implique pour nous tous, aujourd’hui, à notre insu, sont énormes. Nous sommes littéralement perclus d’agonies et de deuils non faits ou mal vécus, hantés par toutes sortes de fantômes qui, si j’en juge par ce que m’a appris la clinique, provoquent des troubles auxquels la médecine ne comprend rien. Heureusement, voilà plus de trente ans maintenant que l’Occident redécouvre l’accompagnement des mourants et plus de vingt ans qu’un travail de fond a recommencé à se faire sur le rapport aux ancêtres et au transgénérationnel. Notamment à partir de ce que le psychanalyste Nicolas Abraham a appelé un fantôme.

Aujourd’hui, nous pouvons être plus précis : le fantôme est toujours un traumatisme concernant le sexe ou la mort - et pas autre chose. Un traumatisme qui se transmet aux générations suivantes sous forme de « secret de famille ». >>

 

Rencontre avec Didier Dumas sur "CLES"                              



02/11/2011
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