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le Pourquoi des pierres

    Les classes chimiques

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J’ai tenu à respecter l’esprit didactique du musée en vous présentant ces spécimens avec chacune des 9 classes chimiques auxquelles ils appartiennent.

 Classe 1, les natifs et alliages : photos de l’or, l’argent, le cuivre
 Classe 2, les sulfures et sulfosels : photo de la stibine
 Classe 3, les halogénures : photo de la fluorite
 Classe 4, les oxydes et hydroxydes : photo de l’hématite
 Classe 5, les carbonates et borates : photos de la calcite, de la cérusite, de l’azurite
 Classe 6, les sulfates, chromates, molybdates et tungstates : photos de la crocoïte, de la wulfénite
 Classe 7, les phosphates, vanadates et arséniates… : photo de la legrandite
 Classe 8, les silicates : photos de l’émeraude, l’aigue- marine, la topaze, l’elbaïte, l’améthyste
 Classe 9, les organiques : photo de la whewellite

 Au-delà de mon admiration et de l’émotion éprouvée devant tant de beauté, j’ai voulu comprendre. Pourquoi ces formes ? Pourquoi ces couleurs ? Pourquoi ces noms ? Et entrepris une recherche documentaire qui m’a passionnée. Je vous en livre quelques éléments.

     Pourquoi ces formes ?

   Elles sont loin d’être le fruit du hasard. La cristallographie, cette science qui étudie la formation, la forme et les caractéristiques géométriques des cristaux, apporte la réponse. Elle a permis de découvrir que la régularité extérieure des formes d’un cristal reflète exactement l’organisation du matériau à l’échelle atomique et que ses propriétés physico-chimiques sont étroitement liées à l’arrangement spatial des atomes dans la matière. Cette découverte, dont le principe repose sur le fait suivant : bombardés sur un cristal, les rayons X sont réfléchis dans des directions caractéristiques qui dépendent de la position dans l’espace de ses atomes, est due au physicien allemand, Max von Laue, prix Nobel de physique en 1914. D’ailleurs, 2014, année du centenaire, a été proclamée « Année internationale de la cristallographie » par l’Unesco, car cette science «reste méconnue du grand public bien qu’elle soit aujourd’hui à la base de toutes les sciences expérimentales ».

Structure du cristal de sodium (NaCl)

Structure du cristal de sodium (NaCl)

    Rappelons que les cristaux composent l’essentiel de la matière solide qui n’a pas pour origine le vivant. La majorité d’entre eux partagent notre vie, sel de table, sucre en poudre…flocons de neige en hiver…calculs rénaux quand nous souffrons de lithiase… ou nous entourent dans les roches, les pierres, les métaux, où ils sont si agglomérés et si petits qu’ils sont invisibles à l’œil nu.

    Les cristaux de grande taille que nous admirons et qui nous fascinent se sont formés dans des conditions particulières. Solidifiés à de grandes profondeurs de l’écorce terrestre, débris volcaniques rejetés par un cratère ; nés à des profondeurs diverses de l’écorce terrestre, sous une forte pression et à très haute température ; par sédimentation… Bref, un cristal formé dans la cheminée d’un volcan ne peut ressembler à celui qui est né dans une grotte froide et tranquille… Sans compter le rôle de la durée de cristallisation, le cristal est d’autant plus gros que celle-ci a été longue et que la matière qui a cristallisé a été abondante. À ces conditions diverses, s’ajoute celle de l’espace dont ils ont besoin pour naître et se développer. Dans un espace restreint, ils peuvent prendre des formes insolites : aiguilles, torsades, feuilles, grappes…

© Institut Néel / neel.cnrs.fr

© Institut Néel /neel.cnrs.fr

   Quand les conditions sont favorables, chaque élément et chaque composé chimique tend à  cristalliser selon une forme définie et caractéristique par sa  symétrie, ses angles, ses  faces… Ces formes géométriques sont classées en 7 systèmes cristallins. Ce sont, à titre d’exemple, le système cubique, hexagonal, tétragonal, rhomboédrique… selon le nombre de faces, la forme de celles-ci, la forme des bases du polyèdre…Les variations sont multiples, mais obéissent toujours à ces principes. Ainsi, à titre d’exemple, à partir de la même particule élémentaire, on obtient selon les minéraux et les processus de croissance des formes diverses de cristaux. Comme le carbone, qui donne 2 minéraux : le diamant et le graphite. Leurs propriétés différentes sont dues à l’arrangement des atomes de carbone. Chimiquement, ils sont identiques, mais ils n’ont pas la même structure cristalline, cristallisation hexagonale du graphite, cubique du diamant, et l’arrangement spatial des atomes dans l’espace n’est pas le même.

       Pourquoi ces couleurs ?

  Si la structure cristalline et la composition chimique précises de la majorité des minéraux détermine les propriétés physiques et chimiques de chacun et permet aux scientifiques de les identifier, ces derniers le font aussi grâce aux habitus et aux couleurs.

   Il y a des minéraux dont l’élément colorant fait partie du minéral, comme la malachite verte et la rhodochrosite  rose. Toutefois, un même minéral, comme par exemple le carbonate de cuivre, peut être vert dans la malachite, bleu dans l’azurite. Un autre sel de cuivre, le phosphate, colorera de turquoise, la turquoise ! Le fer, selon son degré d’oxydo-réduction colorera en vert, bleu, grenat, ou en jaune, la matière. Le même colorant peut produire une couleur différente selon la structure du cristal-hôte. Ainsi, le chrome apporte le rouge dans le rubis et le vert dans l’émeraude, deux gemmes appartenant à deux systèmes cristallins différents.

   Il y a ceux dont la constitution chimique ne donne au départ que des produits incolores tel le quartz, qui ont été colorés, au moment de leur cristallisation, par l’addition d’éléments métalliques : titane, plomb, chrome, fer, nickel, manganèse, cobalt etc. Le cristal de roche est la forme la plus pure du quartz. Les couleurs des deux critaux de quartz que sont l’améthyste (quartz violé) et la citrine (quartz jaune) sont provoquées par des impuretés de fer et de titane.

         Pourquoi ces noms ?

   La variété des noms donnés à ces cristaux tout au long des âges et depuis l’Antiquité témoigne de l’imagination des hommes et ne manque pas d’intérêt. Passons-en quelques uns en revue. Et pour commencer, le mot « cristal », d’où vient-il ? Du grec kryos qui signifie « froid glacial » car, pendant des siècles l’homme a cru que le cristal de roche était une glace si dure qu’elle ne pouvait fondre.

    Il y a les cristaux qui tirent leur nom de la couleur de l’espèce. Ainsi, à titre d’exemple, le béryl : son nom vient du grec beryllos qui veut dire « cristal de la couleur de l’eau de mer », et l’aigue-marine, qui en est une variété, reprend ce nom du latin.  Rhodon, qui signifie rose en grec et chros, couleur, ont donné son nom à larhodochrosite. La crocoïte, dont la couleur est semblable à celle des étamines decrocus Satie va, tire son nom du grec krotios qui signifie safran. La malachite a un nom qui vient d’un mot grec ancien latinisé en allusion à sa couleur semblable à celle des feuilles de la mauve. L’améthyste qui a la couleur du « vin coupé d’eau » tire son nom d’un adjectif verbal du grec ancien qui revient à dire « empêche d’être ivre ». Lahelvite provient du latin helvus  qui signifie ambre, comme la citrine, du latin citrusqui désignait le citron.

   Il y a des cristaux qui tirent leur nom de leur aspect physique, comme par exemple l’oraurum en latin provenant de l’indo- européen au-es qui signifie briller. Comme l’argent, du latin argentum, équivalent sanscrit de ar-jun et qui signifie brillant. Ce n’est pas son aspect physique, qui a donné son nom au diamant, mais son caractère : invincible, en grec adamos.

  S’il est rare de nommer un cristal par le seul élément qui le constitue, comme lastibine, qui tire son nom du grec stibi, ancien nom de l’antimoine, il est plus fréquent que le pays d’où a été extraite l’espèce ou sa localité- type lui donne son nom. On retrouve dans l’autunite, le nom de la ville d’Autun en Saône-et-Loire en France, dans l’elbaïte, le nom du gisement de l’île d’Elbe, dans la topaze, le nom grectopazos de Zabargad, une îleen Mer Rouge. Quant au cuivre, il fut appelé par les Romains: métal de Chypre, aes cyprium, lui-même issu du grec ancien. Rappelons que les premières mines de cuivre furent exploitées dans l’île il y a 7000 ans, et que ce  plus ancien métal utilisé par l’homme, allié à l’étain pour former le bronze, révolutionna sa vie.

   Il y a des cristaux qui tirent leur nom de celui d’hommes qui se sont distingués, soit par leur étude du minéral, comme le minéralogiste autrichien Franz Xaver von Wulfen qui donna son nom à la wulfénite ; soit par leur collecte des premiers spécimens, comme M. Legrand, ingénieur des mines belges auquel fut dédiée la legrandite ; soit par leur générosité, comme la morganite qui doit son nom au banquier américain J.P. Morgan.

   Bien que ne sachant où la placer, je ne peux m’empêcher de vous citer l’émeraude. Son nom provient du latin smaragdus, déformation du mot perse zamarat qui veut dire cœur de pierre.

 

Publié par : Salwa Nsouli-Lalardrie | 1 mai 2014 (LibanAvenir)



05/02/2015
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